La prolifération des cygnes noirs, inédite depuis plus d’une décennie, n’a plus rien de surprenant aujourd’hui. La théorie du cygne noir énoncée par Nassim Nicholas Taleb dans son ouvrage publié en 2007, Le Cygne noir: La puissance de l’imprévisible, trouve aujourd’hui encore écho dans un monde de plus en plus désorienté et incertain.
Cet ouvrage développe la thèse selon laquelle le monde est généralement présenté de manière mystifiante ; un monde dont les événements sont aussi bien prévisibles que calculables grâce à la certitude des lois de la probabilité. Or le monde n’est et ne peut-être prévisible !
Notre instinct pour les raisonnements déterminés et les schémas définis nous conduit à écarter toute éventuelle contradiction avec nos standards établis ;
nous ne sommes pas prêts à apercevoir ce qui nous bouscule et ébranle nos confortables certitudes. Ainsi, nos prévisions et notre veille ne prennent en considération que des éléments déjà connus. L’inconnu nous apeure en effet.
Pourtant, nous (structures et individus) sommes continuellement exposés à des évènements inconnus susceptibles d’avoir un impact d’une importance considérable. À cet égard, une nuance est de taille: un cygne noir n’est pas systématiquement négatif. Une information clé recueillie au hasard par un individu ou une entreprise pourrait changer le cours des événements et influer positivement la donne stratégique. Ceci dit, nous pouvons rendre les cygnes noirs en notre faveur via un traitement et une analyse efficace de l’information.
Le Boycott numérique de trois marques au Maroc, à titre d’exemple, est un ensemble de cygnes noirs que les entreprises n’avaient pas vu venir. La démarche d’anticipation face aux tendances dans le champ des possibles, aurait pu leur être d’une grande utilité dans le sens où celle-ci leur aurait permis de préparer et analyser de manière prospective leur réaction face au phénomène.
In fine, pour que les acteurs économiques prennent des décisions utiles pour leurs entreprises, la compréhension des cygnes noirs demeure indispensable. Les acteurs économiques devraient ainsi ne pas hésiter à laisser la porte ouverte aux risques, les identifier et les traiter au préalable, envisager des arbres de probabilités tout en gardant à l’esprit que le monde est dynamique et nous ne pouvons en aucun cas maitriser toutes les variables.
Ali Moutaïb
Initialement publié dans la lettre HA, édition de décembre 2019.